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Commentary

Point de vue prospectif sur l’Afrique: Les États-Unis et l’Afrique en 2018

U.S. President Donald Trump shares a laugh with Guinea's President Alpha Conde (L), the Vice President of Nigeria Yemi Osinbajo (R) and other African leaders as they arrive to pose for a family photo with participants of the G7 summit during the Summit of the Heads of State and of Governments of the G7, the group of most industrialized economies, plus the European Union, in Taormina, Sicily, Italy, May 27, 2017. REUTERS/Stephane de Sakutin/Pool - RC1D3FEB60A0
Editor's note:

Note de l’éditeur :  vous trouverez ci-dessous un point de vue extrait du chapitre 6 du rapport Foresight Africa 2018. Il développe six thèmes fondamentaux offrant à l’Afrique des opportunités de surmonter ses obstacles et de favoriser une croissance inclusive. Lire le chapitre complet sur la nature changeante des relations extérieures de l’Afrique ici. The English version of this piece can be found here.

Les trois dernières administrations américaines ont globalement fait preuve de continuité au niveau de leurs politiques envers l’Afrique et il est possible que l’administration Trump maintienne cette continuité. Cependant, l’absence de nominations aux postes clés et une focalisation grandissante sur la sûreté et la lutte contre le terrorisme ont jusqu’à présent défini l’approche adoptée par l’administration Trump envers le continent. Les postes clés en matière de politique africaine, en particulier celui de sous-secrétaire d’État aux affaires africaines, n’ont toujours pas été pourvus par une personne confirmée par le Sénat et plusieurs postes d’ambassadeurs sur le continent, y compris dans des pays aussi importants que l’Afrique du Sud, la Tanzanie et en République démocratique du Congo restent vacants. En raison de ces vacances, il est pratiquement impossible de concevoir et d’exécuter une stratégie globale pour ce continent emprunt de diversité et en rapide évolution, une tâche en temps normal déjà difficile.

Les développements qui ont cours en Afrique n’attendront pas que la politique américaine les rattrape et 2018 promet d’être une année pleine de rebondissements. Les enjeux concernant la violence, l’extrémisme, la gouvernance et les droits humains persisteront, mais en parallèle, les énormes opportunités existant en Afrique, en particulier au niveau du commerce et de l’investissement, continueront à se multiplier. Durant les administrations passées, les États-Unis se sont engagés en Afrique par l’intermédiaire d’une série d’initiatives dont : la Loi sur la croissance et les opportunités économiques en Afrique (AGOA), Millennium Challenge Corporation, le Plan d’Urgence du Président Américain pour la Lutte contre le SIDA, Power Africa, Young African Leaders Initiative et l’Initiative sur la gouvernance en matière de sécurité. Un an après l’élection du président Trump, après deux jours de réunions en novembre avec le président de l’Union Africaine et 37 ministres des affaires étrangères du continent, l’approche des États-Unis envers la région demeure floue.

Pour ce qui est des enjeux de paix et de stabilité, la guerre civile au Soudan du Sud a déplacé plus d’un tiers de la population totale du pays estimée à 12 millions. Les États-Unis ont toujours joué un rôle de leadership avec le Soudan du Sud, mais l’administration Trump, en partie à cause de la fermeture du bureau de l’envoyé spécial au Soudan et au Soudan du Sud, a prouvé qu’elle n’entend pas maintenir ces obligations historiques. En République démocratique du Congo, la stratégie de glissement du Président Joseph Kabila en vue de repousser indéfiniment les élections, actuellement prévues pour décembre 2018, étant donné qu’il lui est interdit de briguer un troisième mandat, menace de plonger le pays, et éventuellement la région, dans le chaos politique. Aucune action ou mesure de pression significative n’a été prise à l’encontre du régime malgré la visite de Nikki Haley, l’ambassadrice des États-Unis auprès des Nations Unies et apparente chef de file de la politique américaine sur ces dossiers.

L’extrémisme violent persiste dans plusieurs pays d’Afrique, avec al-Shabaab en Afrique de l’Est et Boko Haram dans le bassin du lac Tchad. En outre, la multitude de groupes extrémistes opérant dans le Sahel risquent d’attirer de plus en plus l’attention des États-Unis en 2018 à la suite du décès de quatre soldats américains au Niger en octobre dernier. L’empreinte militaire croissante des États-Unis en Afrique, soutenue par la présence d’environ 6 000 militaires américains dans la région, l’attaque au Niger et la montée en puissance de l’intervention face aux militants du groupe État islamique au nord-est de la Somalie pourrait éclipser d’autres priorités, comme la bonne gouvernance et les droits humains, surtout en raison des nombreuses vacances diplomatiques et de la réduction du budget du Département d’État américain.

Néanmoins, faire progresser la gouvernance démocratique devrait continuer à être l’une des priorités de l’administration Trump. Le plus grand potentiel en matière de progrès démocratiques en 2018 pourrait bien être au Zimbabwe, après la retentissante démission du président Robert Mugabe à la fin de 2017. Les États-Unis devront prendre certaines décisions politiques concernant la manière de traiter avec le nouveau président Emmerson Mnangagwa (étroitement impliqué dans des violations de droits humains depuis des décennies), l’éventuel retrait des sanctions de longue date et la manière de soutenir les élections programmées pour l’été 2018. Malgré le départ de Mugabe, certains des leaders africains les plus anciens, comme le président ougandais, Yoweri Museveni (un allié des États-Unis dans la lutte contre le terrorisme) et le président du Burundi, Pierre Nkurunziza, manœuvrent pour rester au pouvoir, ce qui mettra à l’épreuve la tolérance des États-Unis envers les leaders qui suppriment les limites de mandats et se maintiennent au pouvoir indéfiniment. Au Kenya, autre allié des États-Unis en matière de lutte contre le terrorisme, les incertitudes politiques découlant des élections tumultueuses de 2017 risquent de limiter les progrès démocratiques et économiques et mettront également à l’épreuve la politique étrangère des États-Unis au regard de la position du pays sur la gouvernance démocratique.

Enfin, le commerce et l’investissement semblent être une priorité de deuxième ordre en Afrique pour l’administration Trump, en dépit du fait que les investissements directs américains effectués l’an dernier dans la région ont atteint 57,5 milliards USD, soit leur plus haut niveau historique d’après le Département d’État. En outre, le Représentant américain au commerce, Robert Lighthizer, a fait preuve de leadership lors du forum de l’AGOA au Togo en août. Le maintien du Conseil consultatif présidentiel sur la façon de faire des affaires en Afrique de l’administration Obama établi dans les locaux du Département du commerce est un signe positif. Les opportunités commerciales sur le continent, en particulier dans les secteurs de l’infrastructure, de l’électricité, des services bancaires mobiles, des services financiers et des produits de consommation continueront à s’amplifier, mais il reste encore à voir si l’administration est suffisamment intéressée ou dispose du personnel nécessaire pour en tirer parti. Rien n’indique que l’administration prévoit dans un avenir proche d’adopter un accord commercial plus réciproque après l’AGOA en vue de soutenir les exportations et les investissements américains face à la domination grandissante des entreprises européennes et chinoises partout en Afrique.

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